Crezan
F190
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F190

F.190 n°(41) / (7173)


            Au printemps 1930, l'aviation éthiopienne ne dispose plus d'aucun appareil capable d'assurer les liaisons postales avec Djibouti, le transport commercial et notamment le transport personnel du Négus. Le Junkers W33 acheté à cette fin s'est écrasé en décembre 1929 et André Maillet, alors chef de l'aviation éthiopienne, a profité de l'occasion pour provoquer le départ de son équipage allemand.


            Un remplacement est nécessaire, les 3 Potez 25 dont dispose le Négus ne pouvant à eux seuls assurer ces liaisons aériennes. Maillet provoque alors la commande d'un F.190. La version qu'il retient est un F.192 doté de grands réservoirs d'ailes et équipé d'un moteur Salmson 9Ab, largement utilisé pour les appareils d'entrainement et de liaison de l'Armée de l'Air.


            La reconstitution de la liste de production est difficile pour cette période sur la seule base des sorties de production. Les cellules F.190 n°41 et 42 correspondent probablement à deux appareils destinés à l'exportation et montés à Toussus en juin 1930. Nous les supposerons produits dans l'ordre de finition, considérant le n°41 comme la cellule utilisée pour le F.192 du Négus et le n°42 comme celle du F.197 équipé en sanitaire et destiné à l'Uruguay. Ils précèdent dans la liste de production le F.190 n°43 de Marcel Avignon.


  

F.192 n°6 / (7173)


            L'appareil commence ses essais dans la deuxième quinzaine de mai. Fin juin, il est réceptionné par Veritas en même temps que le F.192 n°7 destiné à la Belgique, ce qui confirme au passage son numéro de série 6.

            L'appareil part en caisse pour Djibouti où il est monté et mis en service par André Maillet. Fuselage blanc et voilure argent. Il porte des cocardes "à la française" aux couleurs éthiopiennes, mais aucun drapeau de dérive.

            Après l'arrivée du F.192 vert et argent qui sera offert par la France au Négus pour son couronnement, ce premier F.190 éthiopien sera désigné comme le "Farman blanc".

Le F.192 lors d'une présentation à la presse à Addis Abeba sur le terrain d'Akaki en avril 1935 [Coll Jack Meaden].

Les transports de l'aviation impériale sont présentés au Prince Makonnen, duc de Harrar à l'occasion de son anniversaire en novembre 1935.

Le F.192 porte son nom de baptême en amharique : "Harrar".

[Coll Michel Barrière].

Le F.192 acheté au printemps 1930 par le Négus. [© Michel Barrière]

Le F.192 en novembre 1935. [© Michel Barrière]


            Jusqu'à la mi-1931, la liaison postale avec Djibouti reste épisodique. Malgré sa lenteur - le voyage dure 3 jours - le chemin de fer franco-éthiopien (CFE) reste toujours le moyen essentiel de transport courrier, les passagers et le fret venant d'Extrême-Orient et de Madagascar à destination de l'Éthiopie ou les envois au départ de l'Ethiopie. Après le premier service postal Djibouti/Addis-Abeba réalisé en décembre 1929 avec un Potez, deux autres ont été effectués en 1930 (17 avril et 31 octobre), ce dernier probablement avec le F.192 n°6.


            En juin 1931, les choses évoluent. En juin, deux services postaux sont effectués par Corriger, remplacant de amillet à la tête de l'aviation éthiopienne,  les 3 et 19, probablement avec un Farman. Le 3 juillet; Corriger effectue en Farman la sixième liaison courrier vers Djibouti, transportant le romancier Jean d'Esme qui vient de faire un séjour dans la capitale éthiopienne.Le 5 juillet, Corriger retourne à Addis-Abeba avec un passager, Monsieur Selignac, agent des Ets A. Besse (Shell) et le courrier dont c'est seulement le quatrième service dans ce sens.


            Le 11 novembre, Bitwaded Guetatchaou, ministre de l'intérieur et président du conseil éthiopien se rend à Dessie, sa mère étant souffrante. Il part à 7h20 dans l'un des Farman piloté par Corriger qui est de retour à 10h30. La rapidité de ce voyage est évidemment sans commune mesure avec les déplacements terrestres qui, d'Addis-Abeba à Dessie, prennent d'une à deux semaines.

            Le 26 novembre a lieu une liaison postale entre Addis-Abeba et Dessye, sans doute avec un Farman.


            Du 18 au 23 janvier 1932, Mishka Babitcheff, second de Corriger, effectue avec le "Farman blanc" deux voyages dans la région du lac Abaya (Margherita), à 300 km au sud-ouset d'Addis-Abeba, pour ramener dans la capitale un pasteur de la Sudan Interior Mission qui doit y subir une opération.


            Le 12 février 1932, Corriger s'écrase avec le second F.192 au retour d'une mission à Djibouti. Il est gravement blessé, et l'appareil est totalement détruit. Jusqu'en 1934, il vole régulièrement, se partageant des vols de liaison, d'observation et la reconnaissance des lignes aériennes Djibouti - Soudan - Égypte avec le Junkers W.33 reconstruit entretemps.



            En 1935, le F.192 participe comme avion de liaison aux opérations de guerre avec l'Italie. Il est semble-t-il indisponible quelque temps pendant l'automne, mais à partir de fin novembre 1935, il assure des liaisons régulières entre la ville de Dessye, devenue quartier général de l'Empereur, et Addis-Abeba, échappant aux fréquents bombardements italiens de Dessye.

            

            Le 16 janvier 1936, l'américain H. Spencer, nouveau conseiller technique de l'Empereur pour les affaires étrangères, rejoint en vol Dessye accompagné de l'attaché militaire britannique, le Major Holt, dans le F.192 piloté par Babitcheff. Le pilote repart le 17 vers Addis-Abeba et revient le 18 de la capitale, transportant l'américain Colson, conseiller aux finances du gouvernement éthiopien. L'après-midi du 19, Colson et Spencer repartent dans le Farman pour la capitale. Le prince Makonnen quitte également Dessye pour rejoindre la capitale en avion avec le Farman ou le Junkers.


            Le 4 avril 1936, une patrouille de 5 Romeo 37 conduite par Tito Falconi surveillant la route reliant Dessye à la capitale repère et poursuit le Potez 25 n°2 au retour d'un vol de liaison.

            Après avoir survolé la ville, les Italiens se dirigent vers le terrain d'Akaki et mitraillent les appareils situés hors des hangars et les hangars eux-mêmes. Au moins deux appareils, le Potez n°2 et le DH Moth, sont endommagés. Par contre, le F.192 est incendié et détruit. Ses restes sont toujours présents lorsque les troupes italiennes occupent le terrain le 5 mai.

Les Avions Farman

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F.197 n°2 CX-ABH